08 novembre- 22 février 2025

Arébénor Basséne

Tarana

 

Tarana

 

À l’occasion de la 15ème édition de la Biennale de Dakar, Selebe Yoon présente Tarana, une exposition personnelle de Arébénor Basséne.   

Tarana aurait pu être le nom donné au « nouveau monde », cette terre de l’autre côté de l’Atlantique qui a autant fasciné que effrayé les imaginaires durant des siècles. Théorisant une navigation séculaire permanente entre le continent africain et les Amériques, l’historien et linguiste Pathé Diagne propose une histoire alternative des civilisations anciennes, d’une mobilité transcontinentale, bien avant celle des conquêtes européennes. 

Captivé par les grandes épopées de l’histoire, par les empires triomphants et ceux oubliés, ce sont les incertitudes historiques, les écritures multiples de l’histoire, ses bégaiements et ses contradictions, qui deviennent le point de départ de l’œuvre de Arébénor Basséne. Il puise ainsi tout autant dans des récits connus comme celui de la fondation du Mali avec l’épopée de Soundiata, que dans des contre-histoires, comme celle du légendaire roi navigateur Aboubakri II de l’Empire Mandingue et son expédition outre-Atlantique. Tarana, mirages d’histoires, entre réalité historique et mythe géographique, suscite une exaltation foisonnante pour l’artiste. 

À Selebe Yoon, dans une nouvelle série d’œuvres sur batik, Arébénor Basséné emploie des techniques et matériaux qui témoignent de l’histoire mondiale, de ces faisceaux de routes maritimes et terrestres par lesquels ont transité de nombreux savoirs et techniques. Le batik, technique indonésienne introduite sur le continent au XIXème siècle et devenue un artisanat propre à l’Afrique de l’Ouest, permet à l’artiste de tremper ses toiles dans des bains de cire et de pigments naturels formant des strates saillantes et d'intenses gammes chromatiques. Sur ce fond abstrait, il érige progressivement une surface dynamique par l’emploi de matériaux divers, tels que la gomme arabique - matière première qui fit l’attrait des côtes d’Afrique de l’Ouest pour les navigateurs étrangers, l’encre utilisée pour les tablettes coraniques, l’henné et les pigments naturels de la région.  

Dans son élaboration picturale, Basséne s’imagine comme l’un des premiers ou derniers chroniqueurs de ce monde qui observe les reliques du réel, s’octroyant la liberté de le subsumer, de le fantasmer. Il donne ainsi aux toiles l’allure de parchemins et d’archives factices, enregistrant des paysages de textures érodées où survivent les indices d’un temps qui semble révolu. L’ensemble peut s’apparenter à des cartographies sensibles où s’entremêlent les récits des grandes traversées transcontinentales et des navigations maritimes. Alors que des logiques de repérage propres au géographe délimitant les axes de la carte se dévoilent, des tracées de vallées, des circuits fluviaux, des objets qui pourraient être issus de trouvailles archéologiques et des traces qui s'apparentent à celles des premières mains sur terre émergent des œuvres. Simultanément, des constellations célestes, rappelant les astres comme points de repères pour la navigation marine, viennent court-circuiter toutes tentatives d’études scientifiques. De ces multiples strates de matière surgissent d’immenses silhouettes dans des tourbillons d’abstraction ocres ou rosés. Ces personnages, tels des pèlerins ou des spectres de l’histoire, s’absentent par instant face à l’abstraction enveloppante et existent dans une ambiguïté perceptible. 

Entre figures insaisissables, perte d’orientation, dissolution de la forme et du fond, les nouvelles œuvres d’Arébénor Basséne apparaissent tels des simulacres de récits qui auraient pu avoir lieu, une topologie imaginaire ou une invitation au rêve. L’Histoire et son imposture universelle peine à survivre face à la puissance d’une nature suggérée et de son mouvement inéluctable, qui viendrait dissoudre avec elle toutes les épopées bien trop humaines. 

 Arébénor Basséne participe à la 15ème Biennale de Dakar, intitulée “The Wake, L’èveil, Le sillage, Xàll wi”, sous la direction de Salimata Diop, du 7 novembre au 7 décembre 2024.

 

Biographie de l'artiste

Morel Donou

 

 

Originaire de Casamance, au Sud du Sénégal, Arébénor Basséne (n.1974, Dakar) est diplômé d’une maîtrise en Civilisations et Littératures Africaines (2012-2013), d’une double licence en anglais et Civilisations Africaines (2010-2011) de l’Université Cheikh Anta Diop, ainsi que d’un diplôme d'études supérieures artistiques de l'École Nationale des Arts du Sénégal (1997-2001). Fasciné par les anciennes civilisations rêvées ou oubliées, des grands empires d’Afrique à ceux du bassin méditerranéen, ce sont cependant les bégaiements de l’histoire qui donnent naissance aux œuvres d’Arébénor Basséne, construites tels des témoins imaginaires du passé.

 Arébénor Bassène, a eu des expositions personnelles notamment: “Que je naisse, tout doux, semant“, présentée par Selebe Yoon à L’Atlas, à Paris en France (2023) et “Mots de Neige, Histoires en Sable”, à Selebe Yoon à Dakar, Sénégal (2021). Son travail a également été présenté lors des expositions collectives suivantes: “The Wake, l’éveil, le sillage, Xàll wi“, 15ème édition de la Biennale de Dakar, Ancien Palais de Justice, Dakar, Senegal (2024), “MUTATIONS“, Fondation d'art Montresso, Marrakech, Maroc(2024), “Entre Parenthèses“ Selebe Yoon, Dakar Sénégal (2024), “Sur le fil: broderies et tissage“ organisé par le 19M dans un premier temps au musée Théodore Monod (IFAN) , Dakar, Sénégal et dans leur galerie à Paris, France (2023); Il représente le “Pavillon Sénégalais“ au Musée des Civilisations Noires pour la Biennale de Dak’Art (2022); participe en OFF à la Biennale de la Havane, Cuba (2019); “Junction“ au musée Théodore Monod (IFAN)(2017); à l’exposition collective à l’Alliance Française à Addis-Abeba, Ethiopie, (2017); “Regards sur cours“ au Gorée Institute, Gorée, Sénégal (2017); Il figure dans le IN de la Biennale Dak’Art “La Cité dans le Jour Bleu”, Dakar, Sénégal (2016) avec comme commissaire d’exposition Simon Njami; “Le Sénégal à Paris” présenté par la Maison de l’Afrique à la rotonde de Montparnasse (2011); au premier mémorial de Cheikh Anta Diop au Centre Culturel Français (1995).

Il est nominé pour le prix Norval Sovereign African Art Prize, à la Fondation Norval à Cape Town, Afrique du Sud et figure parmi les finalistes en (2023); il remporte le prix de la Mairie de Dakar (2022), le prix UEMOA - Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest (2016) de la biennale de Dark’Art et Le prix du ministère de la culture au 9ème Salon national des artistes plasticiens (2011).

Arébénor Basséne est dans la selection officielle de la 15ème edition de la Biennale de Dakar

Précédent
Précédent

Ibrahim Cissé

Suivant
Suivant

Melinda Fourn